Critique

Publié le 21 janvier, 2023 | par @avscci

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Youssef Salem a du succès de Baya Kasmi

L’autofiction est devenue un genre à part entière, en littérature comme au cinéma. C’est à ce genre délicat que s’attaque Baya Kasmi dans son deuxième long métrage en solo après Je suis à vous tout de suite (2016). La complice de Michel Leclerc s’interroge avec un humour délicieux à la responsabilité morale de l’artiste quand il s’inspire du destin des autres. Un sujet dans l’air du temps auquel elle s’attaque, en racontant comment ce que l’échec condamne à l’oubli peut revêtir des proportions démesurées lorsque le public est au rendez-vous. En l’occurrence, ici, notre héros est un quadragénaire qui semble condamné à croupir parmi le bataillon des soldats inconnus de la littérature et a dépassé la date de péremption au-delà de laquelle il est théoriquement exclu de devenir riche et célèbre. À cette nuance près que Youssef Salem, le personnage campé par Ramzy Bedia fait partie de ces éternels losers qui attirent la sympathie par leurs maladresses et une certaine inadaptation au monde qui les entoure. Alors la notoriété qui lui tombe dessus fait figure de lame de fond aux effets dévastateurs qui va ébranler son responsable au plus profond de ses certitudes d’écrivain et transformer ce brave type en oracle malgré lui. Baya Kasmi réussit la prouesse de revêtir des signes extérieurs de la comédie un sujet ô combien sérieux avec un précieux complice en la personne de Ramzy Bedia, formidable en colosse maladroit contraint d’acquitter le prix exorbitant de sa gloire aussi tardive qu’inattendue. Un conte moral savoureux peuplé de personnages attachants et de non-dits lourds de sens.

Jean-Philippe Guerand

Film français de Baya Kasmi (2022), avec Ramzy Bedia, Noémie Lvovsky, Abbes Zahmani, Melha Bedia 1h37.




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