Critique Passion simple de Danielle Arbid

Publié le 16 août, 2021 | par @avscci

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Passion simple de Danielle Arbid

Le cinéma s’est trop longtemps tenu à distance de l’œuvre d’Annie Ernaux dont le regard sur les choses de l’amour est pourtant parmi les plus novateurs qui soient, parce qu’elle y passe des éléments autobiographiques au crible de la sociologie, en confrontant des situations vécues dans sa chair à l’évolution des mœurs. Derrière son titre modeste, Passion simple, publié en 1992, s’attache à une mère célibataire qui entretient une liaison torride avec un homme d’affaires russe qu’elle retrouve pour des étreintes purement charnelles, sans s’investir affectivement outre mesure. Annie Ernaux a dit vouloir s’exprimer « sans jugement, sans métaphore, sans comparaison romanesque ». Or, c’est très exactement l’objectif qu’a poursuivi la réalisatrice libanaise Danielle Arbid en s’emparant de son texte. Passion simple porte un regard atypique sur l’amour en prêtant à un personnage féminin des sentiments qui sont généralement associés aux hommes. Cette femme libre campée par l’époustouflante Laetitia Dosch constitue le prolongement direct de celle mise en scène dans le film précédent de la réalisatrice, Peur de rien (2015) qui s’attachait à l’apprentissage amoureux d’une jeune étudiante à Paris. Rien d’étonnant que sa réalisatrice ait trouvé dans la prose d’Annie Ernaux un écho à ses propres préoccupations. Ce jeu de miroirs confère à cette adaptation une troublante vraisemblance psychologique. La vision que donne de l’amour Passion simple n’est assujettie à aucun sentimentalisme. C’est l’une des plus éclatantes réussites de ce film labellisé sélection officielle Cannes 2020.

Jean-Philippe Guerand

Film franco-belgo-libanais de Danielle Arbid (2020), avec Laetitia Dosch, Sergeï Polunin, Lou-Teymour Thion 1h39. 




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