Critique Men d'Alex Garland

Publié le 9 juin, 2022 | par @avscci

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Men d’Alex Garland

En deux longs métrages, le scénariste et romancier Alex Garland est devenu, en tant que cinéaste, une valeur reconnue d’un sous genre peu représenté, pourtant la fois très culte et spécifique : le fantastique anglais, ce registre qui part de Lewis Caroll jusqu’à Ben Whetley et a engendré, entre autres, The Wicker Man. Avec Men, son troisième film, l’auteur se place dans une catégorie, l’horreur bucolique, très rattachée à cette grande tradition british. La mise en place est simple, qui voit une femme seule et traumatisée, dans une maison de campagne isolée, se retrouver face à des hallucinations (ou pas). La campagne anglaise est de toute évidence une belle inspiration inquiétante, et Wheatley avait visité le même décor dans sa dernière œuvre. Mais la vraie altérité agressant l’héroïne est indiquée dans le titre, ce sont les hommes, du prêtre local jusqu’au propriétaire du domaine, en passant par son ancien compagnon fraichement suicidé. Cet aspect, évidemment bien dans l’air du temps, est asséné avec un manque de finesse nouveau chez le cinéaste, qui avait épinglé avec plus de subtilité et d’efficacité la masculinité toxique dans son premier film, Ex Machina. L’amalgame soulignée entre le mâle et le mal est valide, mais livrée ici avec une vacuité à peu près totale, comme un fait aussi évident que le cycle de la nature. Cette lourdeur est contre balancée par le surgissement étonnant, et réussi, d’une veine body horror. Il y a en Garland un grand cinéaste de genre, mais il est un peu menacé par la tentation de l’auteur et une volonté de sens qui ne lui sied par vraiment.

Pierre Simon Gutman

Film britannique d’Alex Garland (2022), avec Jessie Buckley, Rory Kinnear, Paapa Essiedu. 1h40.




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