Critique

Publié le 31 janvier, 2022 | par @avscci

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Les Promesses de Thomas Kruithof

À chaque nouveau rôle, on se prend à penser qu’Isabelle Huppert à tout joué, souvent même à plusieurs reprises et sur de multiples tonalités. Les Promesses lui offre toutefois un emploi encore inédit : celui d’une femme maire qui organise sa succession, en passant le relais à son adjoint, tout en essayant de sauver une cité squattée par des marchands de sommeil. L’affaire se déroule dans une banlieue populaire où tout semble réglé comme du papier à musique et où chacun paraît remplir sa fonction en vertu d’un plan de campagne préétabli. Et puis tout bascule et ce bel équilibre vole en éclats. Après La Mécanique de l’ombre (2016), un premier film qui plongeait dans les arcanes de l’espionnage, Thomas Kruithof s’attache aux dessous d’un certain clientélisme, en plein cœur de ce fameux “neuf-trois” où vient échouer toute la misère du monde. L’élue qu’incarne Isabelle Huppert reflète ces paradoxes et symbolise une bourgeoisie de gauche sincèrement éprise de justice sociale qui se heurte à l’effet de réalité saisissant d’une misère endémique, face à l’impeccable Reda Kateb en technocrate issu de l’immigration qui connaît sa ville comme sa poche. Kruithof et son coscénariste Jean-Baptiste Delafon, fin analyste des mœurs socialistes déjà associé à la série Baron noir, décryptent avec acuité les dessous de la politique locale, ses rituels et ses enjeux. À l’approche d’une échéance électorale majeure, Les Promesses représente sans doute le remède le plus radical contre la tentation abstentionniste par son engagement profondément civique qui s’appuie sur un sens de l’observation acéré.

Jean-Philippe Guerand

Film français de Thomas Kruithof (2021), avec Isabelle Huppert, Reda Kateb, Naidra Ayadi 1h38.




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