Critique Les amants sacrifiés de Kyoshi Kurosawa

Publié le 8 décembre, 2021 | par @avscci

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Les Amants sacrifiés de Kyoshi Kurosawa

La mise en avant du nom de Hamaguchi, ici scénariste, sur l’affiche, au détriment de celui du metteur en scène du film, Kyoshi Kurosawa, illustre un peu le fait que l’ancien étudiant a désormais bien dépassé, du moins en notoriété, le maître. Mais ce point ne doit pas gâcher cette collaboration, dialogue entre deux artistes se respectant profondément. En se basant sur l’histoire vraie d’un couple ayant joué un rôle complexe, proche des espions, durant la période ayant précédé la deuxième guerre, le film semble jouer une carte traditionnelle, dans un romantisme déployé sur fond de conflit, proche de classiques célébrés, Les Enchaînés en tête. Mais, avec Kurosawa derrière la caméra, Hamaguchi à l’écriture, c’est à une œuvre bien plus complexe, parfois passionnée, parfois perverse, que nous avons affaire. Bâti autour de l’essence même de la confiance, le récit prend le point de vue de l’épouse subitement délaissée (pour une cause) et rejoint ainsi des thèmes très kurosawaiens, ici simplement dépouillés de leur dimension surnaturelle. Car si l’héroïne ne fait pas face à un fantôme, elle se retrouve également devant un Autre absolu, un homme qu’elle aime, pensait connaître, et qui devient un bloc d’ambiguïtés et de non-dits, et ce jusqu’à la dernière image. L’altérité, la solitude, tous ces thèmes de la réalisation de Kurosawa sont donc bien là, fortifiés par une reconstitution intelligente. Maître Kyoshi n’est peut-être plus la dernière mode, mais il n’a rien perdu de son regard.

Pierre-Simon Gutman

Supai no tsuma. Film japonais de Kyoshi Kurosawa (2021), avec  Yû Aoi, Issey Takahashi, Hyunri. 1h55.




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