Critique

Publié le 7 novembre, 2023 | par @avscci

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L’Enlèvement de Marco Bellocchio

L’Enlèvement est un bon film. Cette phrase simple peut faire comprendre l’étendue du problème. Car, depuis vingt ans, Marco Bellocchio a enchaîné les grands films avec une régularité désarmante, à laquelle il faut ajouter, l’année dernière, une grande série, Esterno NotteL’Enlèvement revisite pourtant les thèmes fétiches du réalisateur. A travers l’histoire vraie d’un enfant juif enlevé à sa famille par l’Eglise dans la deuxième moitié du XIXe siècle, Bellocchio reprend le fil de son histoire de l’Italie, de la constitution de la nation, construite strate par strate (la politique, la mafia, la famille, etc.). Ici, c’est l’Eglise et son chef, le Pape, qui sont observés, au moment de la perte de leur pouvoir au profit de la nation italienne.  Ce nouveau chapitre s’intègre donc parfaitement à la construction presque balzacienne voulue par le metteur en scène. Mais, pour la première fois depuis bien longtemps, des facilités apparaissent. La ficelle de l’émotion est tirée à son maximum, ce qui est inhabituel chez ce réalisateur. La musique omniprésente s’élève par moments à des volumes sonores inquiétants, qui semblent servir de béquille à une mise en scène légèrement moins inspirée.  Bien évidemment, la patte du grand artiste est là. Ses effets de clair-obscur sont toujours aussi éblouissants, et la description de la folie mégalomane du pouvoir percutante. L’Enlèvement reste l’œuvre d’un maître en possession de ses moyens, mais elle annonce peut-être la fin de sa longue période impériale.

Pierre-Simon Gutman

Rapito. Film italien de Marco Bellocchio (2023) avec Barbara Rosi, Paolo Pierobon, Léonard Maltese. 2h05.




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