Critique Leila et ses frères de Saeed Roustaee

Publié le 30 août, 2022 | par @avscci

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Leila et ses frères de Saeed Roustaee

Saeed Roustaee dépoussière le cinéma iranien poli et feutré à la Asghar Farhadi avec une intense chronique familiale qui n’hésite pas à s’inspirer des codes du soap opera (répliques acides, disputes à répétition, rebondissements fréquents…) pour mieux dynamiter le carcan de la famille traditionnelle. Son héroïne, Leila, est une femme décidée et volontaire qui se sent investie du devoir de sauver ses frères de la misère financière comme sociale dans laquelle ils sont enfermés. Personnage clairvoyant et iconoclaste, elle doit se confronter à la mesquinerie et à la vision court-termiste de son père, ainsi qu’aux réticences (en partie misogynes) des principaux intéressés. Ce qui se joue met alors en balance des valeurs traditionnelles, comme l’honneur ou le respect des apparences, avec un réalisme plus immédiat et plus contemporain, consistant à œuvrer concrètement pour un avenir digne. Par sa simple action, l’héroïne met au jour les contradictions et hypocrisies de la société iranienne qui, dans un principe d’irrépressible reproduction sociale, prive ses personnages de toute perspective. Le réalisateur met en scène ces difficultés à composer avec le poids de la société dans d’interminables et irrésistibles conversations entre les différents membres de la fratrie, quitte à lorgner parfois du côté du vaudeville, y compris dans la vivacité crue des dialogues. Il est d’ailleurs résolument plus à l’aise avec cette dimension de comédie satirique qu’avec une dénonciation trop frontale ou explicite. Et c’est justement cette apparente légèreté qui fait à la fois la singularité et la puissance de son propos. 

Marie-Pauline Mollaret

Leila’s Brothers, film iranien de Saeed Roustaee (2022) avec Taraneh Alidoosti, Farhad Aslani, Nayereh Farahani. 2h45.




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