Critique

Publié le 15 janvier, 2024 | par @avscci

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La Tête froide de Stéphane Marchetti

Il y a tout juste deux semaines, Matteo Garrone suivait le calvaire des Africains en route pour l’Europe dans Moi, capitaine. Dans tout juste un mois, on découvrira un autre film majeur couronné à la Mostra de Venise : Green Border d’Agnieszka Holland. Des trajets Sud-Nord et Est-Ouest qui se croisent mais ne se ressemblent pas vraiment, même si on y retrouve ces passeurs qui prospèrent sur le dos des déracinés fragilisés par leur quête d’une terre d’accueil sinon d’un eldorado. C’est le cas dans La Tête froide d’une fille paumée qui découvre un jour qu’elle peut arrondir ses fins de mois en véhiculant des migrants de part et d’autre de la frontière grâce à sa liaison avec un policier des frontières. Le documentariste Stéphane Marchetti se concentre en quelque sorte sur le dernier maillon de la chaîne, comme avant lui Guillaume Renusson dans Les Survivants et Émilie Frèche dans Les Engagés. Constat d’une misère endémique qui entretient un véritable système parallèle au sein duquel chacun trouve plus démuni que lui à exploiter. Avec en son centre cette femme qui passe son temps à attendre et à s’adapter au rythme des autres, comme dépossédée de son libre-arbitre par ses erreurs de jugements et ses mauvais choix. Un rôle illuminé par la composition de Florence Loiret-Caille, actrice qui a toujours brillé par sa singularité et son exigence, jamais aussi à son aise que lorsqu’elle doit incarner des personnages cabossés chez qui l’émotion est à fleur de peau. Une épaisseur humaine qui doit autant à la composition de la comédienne qu’à sa nature profonde. Comme l’ivresse d’un vertige.

Jean-Philippe Guerand

Film français de Stéphane Marchetti (2023), avec Florence Loiret-Caille, Saabo Balde, Jonathan Couzinié 1h32.




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