Critique Hit the road

Publié le 28 avril, 2022 | par @avscci

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Hit the road de Panah Panahi

Sur une route d’Iran, Papa, Maman, le grand fils et son petit frère avancent dans une voiture qui va on ne sait où. Le grand fils est sombre, silencieux. Le père, avec sa jambe dans le plâtre, est attachant, cocasse, peu conformiste. La mère est joyeuse, réaliste et énergique. Et surtout le petit frère, six ans, est d’un dynamisme à toute épreuve, d’une intelligence confondante, portant le film de bout en bout, créant un personnage de cinéma drôle, pétaradant, comme on n’en a pas vu depuis un temps infini. Ce qui fait la qualité du premier long métrage de Panah Panahi (oui, c’est le fils de Jafar !) c’est qu’on rit sans arrêt en comprenant très vite qu’il nous raconte une histoire des plus tristes. On va notamment s’apercevoir que la voiture se dirige vers la frontière avec la Turquie, que les personnages croisent d’autres familles apparemment en fuite, que les enjeux sont ceux du déchirement et de l’angoisse. Comme toujours dans le grand cinéma iranien c’est l’originalité de la forme qui passionne, plus encore que le talent des comédiens, indéniable ici, ou la puissance des images, tout aussi incontestable. Sans avoir l’air d’y toucher, Panahi sait bien que son spectateur voit que tout ici est clandestin, le tournage, les objectifs des personnages, et même les ressorts cachés de l’écriture du scénario. Loin du mélodrame, du sentimentalisme, de la leçon administrée, Panahi réalise une comédie de haute volée. Et on se surprend à penser que de tous les films qui sortent chaque semaine, on en voit peu où les auteurs aient le courage de faire rire, ou plutôt la capacité de faire rire. Quand le rire et la fantaisie, la poésie et la surprise embellissent et transfigurent le malheur réel que l’auteur ne dissimule jamais, on n’est pas loin d’une réussite artistique totale.

René Marx

Jaddeh Khaki. Film iranien de Panah Panahi (2021), avec Pantea Panahiha, Hassan Madjooni, Rayan Sarlak, Amin Simiar. 1h33




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