Critique

Publié le 1 mai, 2024 | par @avscci

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État limite de Nicolas Peduzzi

Présenté l’an dernier à Cannes dans le cadre de la sélection de l’Acid, État limite désigne en fait davantage l’institution que celles et ceux qui viennent s’y faire soigner. Nicolas Peduzzi a choisi pour guide le docteur Jamal Abdel-Kader, un psychiatre de l’hôpital Beaujon qui navigue d’un service à l’autre en s’efforçant de réconforter les esprits, là où ses confrères traitent les corps. Ce film est le chaînon manquant entre Notre corps de Claire Simon et la trilogie de Nicolas Philibert avec lesquels il partage bienveillance et qualité d’écoute. Il est aussi question de vocation dans ce voyage au long cours qui nous donne à croiser aussi des internes, des aides-soignants et évidemment des patients. État limite confronte la situation de notre système psychiatrique submergé par le nombre de patients et une institution entravée par les contraintes administratives. Après deux films tournés aux États-Unis, Southern Belle (2018) et Ghost Song (2021), Nicolas Peduzzi montre comment le fait de vouloir appliquer au système de santé des contraintes de rentabilité revient à le faire dysfonctionner et à laisser les individus se substituer à une institution en danger. L’importance qu’il accorde à l’esthétique dépasse les conventions traditionnelles du documentaire pour intégrer une précieuse valeur ajoutée, à travers des instants saisis en photo par sa propre mère, Pénélope Chauvelot, ainsi qu’une musique originale du pianiste de jazz Gaël Rakotondrabe qui confère à certains moments le tempo d’une comédie burlesque. Mais c’est bien connu, la raison du plus fou est souvent la meilleure.

Jean-Philippe Guerand

Film documentaire français de Nicolas Peduzzi (2023), avec Jamal Abdel-Kader 1h42.




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