Critique

Publié le 7 avril, 2024 | par @avscci

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Drive-Away Dolls d’Ethan Coen

Joel et Ethan Coen travaillent de concert depuis maintenant quarante ans, dessinant une œuvre foisonnante, éclectique et d’une invention rare. Si c’est l’ainé, Joel, qui signe la mise en scène de leurs films, Ethan étant quant à lui crédité comme producteur, les deux frères ne font qu’un dans l’inconscient collectif, à l’instar des Dardenne ou des Larrieu. Or depuis deux ou trois ans, la tentation de travailler en solo taraude chacun des frères. Ethan s’était fait les dents avec un documentaire sur Jerry Lee Lewis. Le voilà qu’il signe sa première fiction. Réussissant au passage à souder la critique comme personne, en négatif. Il est vrai que nous sommes loin des sommets d’ironie glacée et d’humour noir décapant que sont Fargo ou No country for old men. Il est vrai que Drive-Away Dolls a parfois des airs de parodie, réalisé par un débutant qui aurait beaucoup vu les films des Coen. Mais la réprobation est si unanime que la tentation de défendre le film nous a fait de l’œil. Drive-Away Dolls ne donne pas dans la dentelle, mais il possède une telle énergie, un tel désir de provocation qu’il se réclame bien sûr d’un second degré qui jongle avec les clichés, ce dont ne se sont jamais privé les frères, ni Tarantino soit dit en passant. Il serait absurde de taxer Ethan Coen de vulgarité (Oh my Gode !) pour louer le second degré d’un John Waters : le même champ cinématographique est le même. Et last but not least nous sommes séduits par le couple que forment les deux héroïnes, la première délurée, la seconde plus introvertie. Mais les deux soumises à une libido d’enfer (elles sont lesbiennes) qui trouve parfaitement sa place dans ce tonitruant grand-guignol.

Yves Alion

Film américain d’Ethan Coen (2023), avec Margaret Qualley, Geraldine Viswanathan, Beanie Feldstein, Matt Damon. 1h24.




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