Publié le 12 juillet, 2018 | par @avscci
0Zama de Lucrecia Martel
Le retour de la cinéaste argentine Lucrecia Martel est un événement à la proportion de l’ambition de son nouveau long métrage. En adaptant un roman historique et en contant l’histoire d’une sorte de fonctionnaire colonial pris au piège de l’ennui de la solitude et des frustrations des ambitions déçues la cinéaste livre son dernier combat sur plusieurs fronts à la fois. Elle s’attaque en effet ici à la fois à une transposition littéraire à une reconstitution historique et à la peinture d’une folie qui s’insinue doucement avec une tranquillité sournoise trompeuse. Zama répond à toutes ces questions tout en livrant un regard opaque sur un homme qui sombre sans la moindre conscience personnelle de sa chute. L’immense force du film réside dans son présent perpétuel. Il n’y a pas de travail sur le passé guère évoqué et pas beaucoup plus sur un futur fortement bouché. Il n’y a pas non plus de distance induite par le cinéaste entre le héros et la folie qui s’empare lentement de lui. Il n’y que ce présent donc ce temps sans fin qui s’écoule ce regard sur un homme quiet nous avec ne perçoit même pas ses repères son réel s’effondrer tout autour de lui. Là où tant de cinéastes se servent d’effets appuyés et démonstratifs pour tenter de représenter l’indicibleMartel réalise une sorte d’hommage aux puissances premières et primitives du cinéma capable de capter une abstraction mentale avec une apparente simplicité forcément plus touchante et tranchante.
Pierre-Simon Gutman
Film argentin de Lucrecia Martel (2017) avec Daniel Gimenez, Cacho Lola Duenas Matheus Nachtergaele. 1h55.
Critique en partenariat avec l’ESRA.