Publié le 18 janvier, 2019 | par @avscci
0Une jeunesse dorée d’Eva Ionesco
1979, avant le sida. Tout est permis. C’est la « parenthèse enchantée ». Fabrice Emaer vient de rouvrir le Palace à Paris. On peut se prendre pour les enfants terribles de Cocteau, pour Musset et George Sand, pour Zelda et Fitzgerald, on peut rejouer Les Liaisons dangereuses. Les Incroyables et les Merveilleuses de ce temps-là s’appellent Alain Pacadis, Farida Khelfa, Kenzo, Louboutin, Gaultier, Loulou de la Falaise, mais aussi Roland Barthes ou Mick Jagger. Eva Ionesco a alors 14 ans. Quarante ans plus tard elle raconte ce moment inouï, qui à l’époque semblait déjà un rêve éveillé. Après son premier film, Little Princess, récit d’une enfance maltraitée, elle poursuit son autobiographie avec cet instant de dangers et de risques, sans cacher les hypocrisies, les illusions, les vertiges parfois suicidaires. Mais elle raconte surtout la liberté d’une fugueuse, d’une fougueuse, d’une adolescente pour qui le monde s’ouvre. Galatéa Bellugi, déjà géniale dans L’Apparition de Xavier Giannoli, prend l’apparence de la petite Eva et sert la vision poétique de la cinéaste au miroir retourné. Huppert et Poupaud, riches, beaux, raffinés, pratiquent tranquillement le détournement de mineurs. Eva saura bientôt leur échapper. Le spectateur se trouve devant un film hors du temps, lumineux et sombre. La beauté des décors, des artifices, des comédiens eux-mêmes, la nostalgie assumée et splendide. L’éclat doré de la jeunesse.
René Marx
Film français d’Eva Ionesco (2018), avec Galatéa Bellugi, Isabelle Huppert, Melvil Poupaud, Lukas Ionesco, Alain-Fabien Delon. 1h52.
Critique en partenariat avec l’ESRA.