Terminal Sud de Rabah Ameur-Zaïmeche
Pour son sixième long métrage, Rabah Ameur-Zaïmeche pose une question simple et effrayante. Comment rester un honnête homme quand le monde appartient à des brutes ? Il a été traumatisé par les années noires d’après 1992 en Algérie. Il ne les a pas vécues directement. Ayant grandi à Montfermeil, étudiant à Paris, il a ressenti de loin les horreurs de ces moments-là. Mais comme nous tous, il sait combien, presque trente ans plus tard, les dangers sont toujours présents. Et combien de femmes et d’hommes vivent aujourd’hui sur cette planète comme vivaient les Algériens d’alors, pris entre des gangsters que seuls leurs drapeaux distinguent. Le médecin interprété par Ramzy Bedia a les mêmes rêves que ses frères humains. Faire son travail proprement, aimer, être en sécurité. Dans le pays méditerranéen non identifié du film, dans une époque qui pourrait être les années 90 comme 2019, il est bloqué entre les flics, les militaires, les extrémistes religieux et il prend des coups de toute part. L’angoisse véhiculée par la puissance narrative du cinéaste comme par la conviction du comédien est celle qui obsède chacun aujourd’hui. Le flou volontaire du lieu et du temps perturbe cependant. Des séquences émouvantes, souvent très fortes, rythment les épreuves vécues par le médecin perdu dans l’Histoire, mais l’allégorie limite ici l’adhésion du spectateur.
René Marx
Film français de Rabah Ameur-Zaïmeche (2018), avec Ramzy Bedia, Amel Brahim-Djelloul, Slimane Dazi. 1h36.