Critique

Publié le 23 avril, 2024 | par @avscci

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Bushman de David Schickele

Ce film vieux de plus d’un demi-siècle n’avait bizarrement jamais trouvé le chemin des salles françaises. Il s’attache à un Nigérian réfugié dans la Californie post-soixante-huitarde endeuillée par les assassinats du pasteur Martin Luther King et du candidat aux élections présidentielles Robert Kennedy. Dans la baie de San Francisco, ce jeune homme déraciné qui se promène pieds nus avec ses chaussures sur la tête devient la coqueluche de la communauté afro-américaine et fraie avec des milieux bohèmes qui prônent l’amour libre et les relations interraciales. Au point de ne pas remarquer que son visa est arrivé à expiration. Dès lors, la fiction devient la réalité et est assujettie au destin de ce demandeur d’asile plongé dans le chaudron américain en fusion. Le noir et blanc très contrasté renvoie à l’audace de certains films de la Nouvelle Vague. Tourné caméra à l’épaule dans les fameuses rues de San Francisco, Bushman est interprété par des inconnus dont Jack Nance qui deviendra célèbre grâce au premier long métrage de David Lynch, Eraserhead (1977). Après Give Me a Riddle (1966) qui lui a fait rencontrer son futur “Bushman”, Paul Eyam Nzie Okpokam, David Schickele se situe résolument à l’écart du cinéma américain de l’époque, qu’il s’agisse du Nouvel Hollywood ou de la Blaxploitation qui se contente d’accommoder le cinéma de genre à une minorité ethnique sous-représentée sur les écrans. Bushman constitue en cela un témoignage exceptionnel sur son époque et des communautés marginales rarement montrées au cinéma. On aurait aimé rencontrer ce Schickele mort à 62 ans en 1999.

Jean-Philippe Guerand

Film américain de David Schickele (1971), avec Paul Eyam Nzie Okpokam, Elaine Featherstone, Jack Nance. 1h13.




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