Critique

Publié le 7 juillet, 2022 | par @avscci

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After Yang de Kogonada

L’époque est décidément aux robots. Situé dans un proche avenir indéterminé, le film de Kogonada s’attache à l’absence et au manque qu’engendre la défaillance soudaine d’un auxiliaire de vie devenu le membre à part entière d’une famille unie. Cette comédie de mœurs traite de la puissance des sentiments face à une déshumanisation annoncée comme inéluctable. Elle n’a nul besoin de s’appesantir sur les relations intimes qui se sont nouées entre la gamine et l’être de synthèse qui en a assumé la charge. Le film choisit l’alternative qui consiste à s’attacher aux conséquences de cette complicité devenue une affection profonde. After Yang est une fable philosophique magnifique qui table sur le fait que rien ne pourra jamais égaler la nature humaine en termes d’affect et d’affection. Kogonada choisit pour cela un registre rarement abordé par la science-fiction traditionnelle en décrivant les relations humaines comme hermétiques aux progrès les plus novateurs. Sa fonction de nounou confère à Yang une importance particulière qui se révèle indissociable des relations qu’il instaure avec sa famille d’adoption et ne peut s’achever par une erreur système banale et un remplacement standard par un androïde de substitution, présenté évidemment comme encore plus performant. Son patronyme asiatique apparaît d’ailleurs comme la projection du fantasme de la gamine adoptive qui l’a baptisé d’un nom évocateur de sa propre identité d’origine. After Yang apparaît en cela comme une sorte de prophétie mélancolique sur un avenir qu’aucun progrès technologique ne réussira à soustraire à sa fragilité humaine.

Jean-Philippe Guerand

Film américain de Kogonada (2021), avec Colin Farrell, Jodie Turner-Smith, Malea Emma Tjandrawidjaja, Justin H. Min. 1h36.  




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