Muganga – Celui qui soigne

Voilà un film qui arrive à point nommé. À l’heure où le féminisme est revenu au centre
des préoccupations sociétales, sortir un film sur Denis Mukwege est pertinent. Pendant
des années, ce gynécologue, prix Nobel de la paix en 2018, a soigné les femmes victimes
de très violentes agressions sexuelles dans la région du Kivu, qui aujourd’hui souffre
toujours de terribles conflits. La réalisatrice se focalise sur la zone du monde où la
culture du viol reste exploitée comme arme de guerre, mais où résiste un homme
exemplaire. Ou comment évoquer le sexisme le plus criminel tout en se gardant de
caricaturer la masculinité. Le film n’évite pas totalement un certain lissage, par exemple

en choisissant un bel acteur, au demeurant excellent, pour incarner le héros. Et l’allure
gauche indissociable de Vincent Macaigne, qui joue le médecin belge épaulant Mukwege,
semble inappropriée à son rôle. Mais l’ensemble est loin de ce que l’on pouvait craindre —
une fiction pompeusement mélodramatique masquant la tragédie en se concentrant sur
une figure héroïque. Concernant les scènes de viols, la réalisatrice a compris la nécessité
de trouver la bonne distance afin de ne pas se compromettre dans le superficiel ou le
sensationnalisme. Comme Petit Pays (Éric Barbier, 2020), qui parlait d’autres violences
dans une région voisine, la souffrance des victimes est transmise avec dignité en se
limitant à suggérer ce qui est nécessaire. La retenue générale du film lui permet de
trouver un équilibre entre horreur et espoir, le rendant assez émouvant.
Tancrède Delvolvé
Film franco-belge de Marie-Hélène Roux (2025), avec Isaach de Bankolé, Vincent
Macaigne, Manon Bresch, Babedita Sadjo. 1h45.