Critique

Publié le 14 juin, 2025 | par @avscci

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A Normal Family de Jin-Ho Hur

Un hurluberlu aux commandes d’un bolide agresse un automobiliste à un feu par ce qui ressemble à un acte gratuit de violence routière. Deux frères aux moyens confortables se retrouvent régulièrement à dîner dans le salon privé d’un restaurant de Séoul où leurs compagnes jouent les potiches. Quand l’avocat affecté à la défense du chauffard se trouve confronté à des sentiments qui questionnent sa conception intime de la morale, un événement survient au cœur de son propre cercle familial qui fait voler en éclats cette fratrie de notables coupée des réalités. A Normal Family s’inscrit dans la tradition la plus dure du cinéma coréen, celle qui a engendré Parasite, la Palme d’or quadruplement oscarisée du maître subversif Bong Joon-ho. Paradoxalement, pourtant, son scénario -que s’est contenté de mettre en scène Jin-Ho Hur- s’inspire d’un roman du Néerlandais Herman Koch intitulé Le Dîner (Belfond, 2011) qui a déjà donné lieu à trois adaptations cinématographiques aux États-Unis et en Italie. Un sujet qui s’inscrit naturellement dans le contexte d’une Corée du Sud où le libéralisme est devenu un dogme absolu, quitte à favoriser l’émergence d’une lutte des classes encore plus radicale. Le film en donne d’ailleurs une illustration saisissante au cours d’une scène où des gosses de riches passent à tabac un sans- abri. Là éclate la violence de cette société inhumaine qui a perdu tout sens des valeurs. Dès lors, plus rien ne semble retenir ces intouchables prêts à tout pour sauvegarder leurs privilèges. Les apparences s’avèrent aussi rudes que le film apparaît aussi âpre et désabusé.

Jean-Philippe Guerand

Bo-tong-ui ga-jog. Film sud-coréen de Jin-Ho Hur (2023), avec Sul Kyung-gu, Jang Dong-gun, Kim Hee-ae, Claudia Kim. 1h49.




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