Critique

Publié le 29 mai, 2024 | par @avscci

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Une autre vie que la mienne de Malgozarta Szumowska et Michael Englert

Une autre vie que la mienne est un film qui travaille une matière thématique et narrative très à propos en ces temps, comme à pu en témoigner la majeure partie de la programmation cannoise récente : le genre, l’identité, son choc avec la société, voire la nation. Soit un jeune homme, bon père et bon mari dans la Pologne soviétique des années 1980, qui vit, bien évidemment, une autre vie que la sienne, une existence qu’il ne peut que toucher du doigt lors des fêtes, carnavals, lui permettant d’endosser des déguisements qui sont en fait le vrai miroir de son être. Puis vient la chute du mur, celle de l’union soviétique, et avec elles un vent de liberté que le personnage prend, peut-être avec naïveté, comme un signe et l’occasion de s’assumer enfin pleinement. Le récit et la réalisation déroulent jusque-là assez sagement les fastes de la reconstitution, faisant bien entendu se caler le déroulé de la vie du protagoniste avec celle de sa patrie. Le principe n’est pas inintéressant, mais la mise en scène reste souvent à la surface, comme si la vie qu’elle regardait n’était effectivement pas la sienne, avec une distance étonnante qui rend l’œuvre un peu froide. Puis, dans sa dernière partie, lorsque le mariage du personnage se reconstitue, contre toute attente, et lorsque le monde commence enfin à refléter son âme et son essence, l’utopie gagne finalement le regard des cinéastes. Quelques beaux plans d’une Pologne toujours froide mais enfin plus accueillante élèvent le film et lui permettent de toucher un extrémis une émotion jusque-là un peu muette.

Pierre-Simon Gutman

Kobieta Z… Film polonais de Malgozarta Szumowska et Michael Englert (2023), avec Malgorzata Hajewska, Joanna Kullig, Jacek Braciak. 2h04.




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