Critique Suzanna Andler de Benoît Jacquot

Publié le 2 juin, 2021 | par @avscci

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Suzanna Andler de Benoît Jacquot

Benoît Jacquot est un cinéaste en mouvement perpétuel qui réussit la gageure de tourner au rythme d’un film par an, en variant les plaisirs. Toujours en quête de sensations nouvelles. Il revient en l’occurrence avec son nouvel opus à ses toutes premières amours, quand il était assistant de Marguerite Duras, de 1972 à 1975. En cela, il se trouvait plus légitime qu’aucun autre de ses confrères pour porter à l’écran sa pièce Suzanna Andler, tant il a vu la cinéaste s’emparer de ses propres mots et les polir pour les transfigurer à l’écran. L’argument se trouve réduit à sa plus simple expression. Lors de la visite d’une maison du Midi où elle envisage de venir passer l’été avec son amant, une femme mariée se voit assaillie par les pensées et les émotions que suscite cette perspective. Ce huis clos introspectif, Jacquot l’a encore épuré en limitant le nombre des protagonistes. Comme c’est souvent le cas chez Duras, c’est le lieu qui habite les personnages. En cela, la mise en scène se détache de celle de Son nom de Venise dans Calcutta désert (1976) qui dissociait les images de la bande son, mais aussi du hiératisme dépouillé du Camion (1977). Le metteur en scène se met à la fois au service d’un texte magnifique de pureté et d’une actrice qu’il dirige dans cette pièce conçue en 1968 à l’attention de l’actrice Loleh Bellon. Littéralement caressée par la caméra, Charlotte Gainsbourg se révèle aussi inattendue que stupéfiante dans ce rôle auquel elle apporte une émotion qu’on pourrait qualifier de pointilliste, tant elle procède par touches minuscules.

Jean-Philippe Guerand

Film français de Benoît Jacquot (2020), avec Charlotte Gainsbourg, Niels Schneider, Nathan Willcocks 1h31.




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