Nina et le secret du hérisson d’Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli

Le duo Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli (Une vie de chat, Phantom boy, et nombre de courts métrages dont L’Égoïste et Un plan d’enfer) revient avec ce qui est sans aucun doute son film le plus politique et engagé : un conte contemporain vécu à hauteur d’enfants, sur fond de chômage et de lutte sociale. Nina et Mehdi, les deux jeunes héros, mettent en effet au point le plan parfait pour retrouver l’argent volé par le propriétaire malhonnête de l’usine où travaillaient leurs pères, et le distribuer à tous les ouvriers qui ont perdu leur emploi. Dans la droite ligne du reste de leur œuvre, les deux cinéastes ajoutent à cet ancrage réaliste des références au film de genre et au cartoon, travaillant avec justesse la dualité entre un contexte “sérieux” et un récit léger, bourré de gags et d’énergie, qui s’enracine dans l’imaginaire foisonnant de Nina. Visuellement, le film porte également son propre univers, coloré et vif, hanté par les inimitables silhouettes allongées de Felicioli et par un bestiaire plein de fantaisie, du hérisson qui cherche inlassablement un travail au gros chien patibulaire qui garde le trésor. On sent que le duo tient le jeune public en haute estime, par la manière qu’il a de soigner l’écriture et le rythme de son récit, intelligent et captivant sans être uniformément trépidant, et par les messages qu’il fait passer en filigrane : il faut se battre pour ses convictions, ne pas s’avouer vaincu face à l’adversité et garder l’espoir que chacun, quels que soient ses spécificités, finisse par trouver sa place dans le monde.

Marie-Pauline Mollaret

Film d’animation français réalisé par Alain Gagnol et Jean-Loup Felicioli (2023), avec les voix d’Audrey Tautou, Guillaume Canet, Guillaume Bats. 1h18.