Linda veut du poulet de Chiara Malta et Sébastien Laudenbach

Linda rêve de goûter à nouveau la spécialité culinaire de son père, décédé quand elle était toute petite. Mais en ce jour de grève générale, comment trouver du poulet ? Au-delà de ses enjeux en apparence minimalistes, le premier long métrage cosigné par Chiara Malta et Sébastien Laudenbach est une fable familiale pleine d’humour et de fantaisie autour du travail de deuil et des familles de substitution que l’on se choisit. Autour de l’héroïne, adultes et enfants s’activent donc pour lui venir en aide, mais aussi parfois pour lui mettre des bâtons dans les roues, dans une joyeuse cacophonie libertaire. L’occasion pour les deux cinéastes de mettre en place un univers visuel d’une grande richesse, reposant sur l’utilisation d’aplats de couleurs vives (chacune étant associée avec un personnage) et d’une stylisation extrême du trait, qui confine par moments à l’abstraction. Les rebondissements, courses-poursuites et autres gags permettent de mettre en scène toute une galerie de personnages cocasses et décalés, tandis que le cheminement du récit vante la force du collectif, le refus de l’autorité, et le triomphe de l’entraide. Bien sûr, on aurait aimé que le film se fasse plus engagé (que Linda mange du tofu aux poivrons et que le mouvement social ne soit pas un simple élément de contexte, par exemple), ce qui lui aurait apporté une dimension plus contemporaine. Pour autant, en s’en tenant au registre de la fable, il gagne en poésie et s’autorise un salutaire petit grain de folie.

Marie-Pauline Mollaret

Film d’animation de Chiara Malta et Sébastien Laudenbach (2023) avec les voix de Mélinée Leclerc, Clotilde Hesme, Laetitia Dosch, Esteban. 1h16.