L’Enfant rêvé de Raphaël Jacoulot

Quatre longs métrages en l’espace de quatorze ans : Raphaël Jacoulot ne fait pas partie des stakhanovistes du grand écran. Mais ces quatre films suffisent à marquer son territoire cinématographique, signaler ses obsessions, ses influences, son talent. Ses films ne sont sans doute pas tous provinciaux par hasard, ils ne titillent pas une fibre simenonienne, ou chabrolienne si l’on préfère (mais le romancier et le cinéaste ont souvent regardé dans la même direction) par opportunisme. Chez Jacoulot, la peinture des passions humaines débouche naturellement sur un constat à la fois empathique et désespéré. Car si les personnages de ses films peinent à réfréner leurs pulsions profondes et finissent toujours leur parcours dans une impasse, ils savent nous faire partager leurs passions. Ainsi celui que campe Jalil Lespert dans L’Enfant rêvé, dont l’épouse ne parvient pas à enfanter. Sa frustration tourne à l’obsession. Et quand une aguichante voisine croise son chemin, les dés de la tragédie sont jetés. Le désir d’enfant chez l’homme n’est pas un thème souvent visité par le cinéma, les écueils étaient nombreux qui auraient pu entraîner le film sur une pente fatale. Mais cet Enfant rêvé conserve une grâce, une sensibilité, un romantisme qui ne se démentent pas, le cinéaste faisant preuve au passage (comme dans ses films précédents) d’un sens du décor et d’un amour de la nature qui ajoutent à la sensualité du propos.

Yves Alion

Film français de Raphaël Jacoulot (2020), avec Jalil Lespert, Louise Bourgoin, Mélanie Doutey. 1h47.