Critique

Publié le 25 septembre, 2023 | par @avscci

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Le Chemin de l’espérance de Pietro Germi

La sortie de trois films restaurés de Pietro Germi (1914-1974) permet de reconsidérer la carrière d’un auteur souvent laissé au second plan par les amoureux du cinéma italien. Divorce à l’italienne reste son film le plus célèbre, plus célèbre même que Ces messieurs dames, sa Palme d’Or 1966 (ex-aequo avec Un homme et une femme). L’itinéraire changeant de Germi a souvent découragé les analystes. Ressortent donc aujourd’hui Séduite et abandonnée (1964), Au nom de la loi (1949) et Le Chemin de l’espérance (1950). Ce dernier film, méconnu, prend en 2023 un relief qui bouleverse la chronologie. Comment des villageois siciliens sont convaincus par un escroc (Saro Urzì) de partir vers la France, traversent un pays inconnu, l’Italie, se perdent, s’égarent et finissent, au bout de leur route, dans ces mêmes cols alpins où passent aujourd’hui des milliers d’exilés qui leur ressemblent malgré les trois-quarts de siècle qui ont passé. La forme mélodrame est exactement adaptée au récit puisqu’il s’agit d’émouvoir le spectateur avec les vicissitudes d’honnêtes gens pris dans le labyrinthe d’un monde qu’ils ignorent, de victimes désignées, abusées, et remplies d’espérance et d’énergie. De victimes (de héros ?) qu’en 2023 on traite d’envahisseurs. Raf Vallone et Elena Varzi, qui ne se quitteront plus jusqu’à la mort de l’acteur en

2002, sont les protagonistes de ce film choral. Mais c’est tout un groupe que nous suivons, qui nous bouleverse comme les pionniers d’un film de Ford. Le jeune scénariste du Chemin de l’espérance s’appelle Federico Fellini et Germi lui rendra hommage en citant La Dolce Vita dans Divorce à l’italienne. Quant à la conclusion du Chemin de l’espérance, nous ne la dévoilerons pas. Contentons-nous de dire qu’elle serait, aujourd’hui, invraisemblable et que cette invraisemblance a quelque chose de bouleversant.

René Marx

Il cammino della speranza. Film italien de Pietro Germi (1950) avec Raf Vallone, Elena Varzi, Saro Urzì. 1h45




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