Critique

Publié le 1 mai, 2024 | par @avscci

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Jusqu’au bout du monde de Viggo Mortensen

Le premier long métrage réalisé par Viggo Mortensen avait déçu, surtout vu le charisme et la carrière du comédien, ayant démarré chez Sean Penn, devenu une star grâce à la « fantasy » du Seigneur des anneaux, avant de devenir contre toute attente l’acteur fétiche de Cronenberg. Tous ces metteurs en scène avaient néanmoins rarement exploité pleinement l’aura de Mortensen, digne du Hollywood classique, cette aspect cowboy entraperçu avec succès dans quelques productions. Ce qui fait de son deuxième film de cinéaste une si bonne surprise, car il est, contrairement au premier, l’œuvre que l’on imaginait de la part de l’artiste. C’est-à-dire un western à la fois classique et mélancolique, classieux mais avec un sous-texte ambigu. L’histoire elle-même se concentre sur un couple, vu principalement du point de vue féminin, tout en démarrant par la mort de l’héroïne, conférant au récit entier une sensation de deuil permanent, d’une perte déjà advenue et qui s’étend jusqu’au monde décrit, cet Ouest que le héros sent disparaître. Sous cet angle, Jusqu’au bout du monde est empreint d’un grand classicisme, en réactivant le thème de la description du crépuscule d’une époque et de ses valeurs. Mais Mortensen, qui incarne un personnage méfiant envers les responsabilités viriles qu’on veut lui accoler (shérif, soldat) est aussi un auteur malin, qui ne semble jamais adhérer à la décadence d’un monde probablement imaginaire. Il filme plutôt ce qui peut être sauvé : des bouts de paysage, l’amour filial, la mer qui surgit subitement, et livre ainsi un western digne, fidèle à l’image fantasmée que l’on avait de lui.

Pierre-Simon Gutman

The Dead don’t Hurt. Film américain de Viggo Mortensen (2023), avec Viggo Mortensen, Vicky Krieps, Danny Huston. 2h09.




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