Critique

Publié le 4 janvier, 2023 | par @avscci

0

Joyland de Saim Sadiq

Dans une famille de Lahore, un jeune homme marié subit la pression familiale qui lui enjoint de devenir père et de dénicher un emploi. Engagé dans un cabaret, il tombe sous le charme d’une danseuse qui s’avère être… un transsexuel. Dès lors, il va devoir concilier cette passion clandestine avec ses responsabilités dans un pays encore en proie à une intolérance viscérale dans le domaine des mœurs. Découvert au dernier Festival de Cannes où il a obtenu à la fois le prix du jury Un certain regard et la Queer Palm, Joyland a connu quelques démêlés avec la censure pakistanaise, sous l’effet de la pression religieuse. Ce film teinté d’une forte composante autobiographique aborde en effet un sujet tabou dans cette société que le poids de la tradition rend particulièrement rétrograde sur le plan des mœurs. C’est tout le paradoxe de Joyland de s’inscrire dans une réalité cachée qui tranche avec une conception ancestrale du monde. En se glissant ainsi dans cet interstice minuscule qui sépare la tradition de la modernité, Saim Sadiq a sans doute contribué à faire évoluer les mœurs de son pays, en contraignant tout au moins ses compatriotes à y réfléchir sérieusement, sous les auspices favorables de son aura internationale. Il utilise pour cela les ficelles du mélodrame en reprenant à son compte une solide tradition. Joyland assume ses partis pris en abordant résolument son sujet comme une histoire d’amour classique où les battements de cœur font écho au trouble ressenti par le personnage principal face à un émoi qui contraste avec son statut social de jeune marié promis à un avenir tracé.

Jean-Philippe Guerand

Film pakistanais de Saim Sadiq (2022), avec Ali Junejo, Alina Khan, Sania Saeed 2h06.




Back to Top ↑