Critique Il n'y aura plus de nuit d'Eleonore Weber

Publié le 15 juin, 2021 | par @avscci

0

Il n’y aura plus de nuit d’Eléonore Weber

Le principe du film documentaire a tellement été secoué, modifié (voire malmené pour certains) depuis le surgissement de Strip Tease d’un côté, de la télé réalité de l’autre, que l’apparition d’une œuvre aussi dure et radicale que Il n’y aura plus de nuit agit comme un étonnement. De manière théorique, ce documentaire, second long métrage d’Eléonore Weber, appartient au registre des films d’archives, plus précisément à cette veine du documentaire qui ne se base pas sur la production ou captation de plans (dont l’exemple le plus fort et toujours actuel demeure Frederick Wiseman) mais uniquement sur la réutilisation d’images déjà tournées et diffusées, que le montage va triturer jusqu’à leur faire dire un sens éloigné (ou, au contraire, mis à nu) de leur utilisation première. C’est une veine riche, où s’est illustré Chris Marker (Le fond de l’air est rouge) et où officie exclusivement l’un des documentaristes les plus respectés au monde (Adam Curtis). Mais, dans ce cas, Weber innove ne mélangeant aucunement les sources, puisque toutes les images proviennent des vues de drones utilisés par l’armée, vues commentées à la fois par les militaires et une voix off (Nathalie Richard), qui tentent de déterminer si les ombres au sol doivent être tuées, ou pas. La cinéaste livre une expérience violente, troublante, où la perception des images, leur interprétation, devient, tout à fait littéralement, une question de vie ou de mort. Le malaise évident que crée le film est une interrogation plus large sur notre capacité à nous cacher derrière des images, à nous mettre à distance de réalités que l’on peut apercevoir, mais sans aucune envie de pleinement les voir.

Film documentaire d’Eléonore Weber (2020), avec la voix de Nathalie Richard. 1h15.




Back to Top ↑