Critique

Publié le 21 mai, 2022 | par @avscci

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Evolution de Kornel Mundruczo

De Delta à La Lune de Jupiter, en passant par White God ou Tender Son : The Frankenstein project, Kornel Mundruczo nous a habitués à des images fortes et résiduelles, hantant des récits arides et fiévreux sur les vices et les vertus de l’humanité. Bien que dans la continuité, Évolution est probablement son film à la fois le plus conceptuel et le plus limpide, construit en trois plans séquences virtuoses resserrés autour de trois générations de survivants à la Shoah : Eva, le bébé miraculé rescapé d’Auschwitz, Léna, sa fille qui porte le poids écrasant du passé et Jonas, son petit-fils, qui tente de rompre avec ce fardeau familial. 

En trois moments-clé dans la vie de ses personnages, le réalisateur revisite le traumatisme originel et en étudie la persistance et l’écho dans le temps, ainsi que ses conséquences, conscientes ou intériorisées, sur ceux qui ne l’ont pourtant pas vécu directement. Si la séquence d’ouverture est d’une fulgurance visuelle qui n’a d’égale que l’état de sidération dans lequel elle plonge le spectateur, le deuxième chapitre, constitué d’un long dialogue entre la mère et la fille, dans le cadre unique d’un appartement qui finit – littéralement – par prendre l’eau de toute part, permet de poser des mots et des émotions sur l’indicible. Puis, dans une troisième partie qui prend enfin l’air, se joue non seulement l’espoir d’un avenir apaisé, mais surtout la possibilité de concilier devoir de mémoire et désir de s’extraire des horreurs du passé pour inventer sa propre façon d’être vivant. 

Marie-Pauline Mollaret

Film hongrois de Kornel Mundruczo (2021), avec Lili Monori, Annamária Láng, Goya Rego, Padmé Hamdemir. 1h37.  




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