Critique Yves de Benoît Forgeard

Publié le 26 juin, 2019 | par @avscci

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Yves de Benoit Forgeard

Les objets connectés ne sont plus de la science-fiction depuis longtemps, et l’idée de départ du troisième long métrage de Benoit FORGEARD (Réussir sa vie, Gaz de France), un frigo intelligent qui bouleverse la vie de son propriétaire, est finalement assez plausible. Jerem, rappeur un peu loser, devient ainsi rapidement accro à son nouveau compagnon de métal, un “fribot” surnommé Yves, qui ne se contente pas de veiller à son bien-être alimentaire, mais l’aide également dans toutes les circonstances de la vie, y compris les plus intimes. Evidemment, le réalisateur pousse le concept à son paroxysme, en jouant sur l’ambiguïté de la nature d’Yves : être conscient, doué de raison et de sentiments, mais enfermé dans un corps froid et impersonnel de machine anonyme, et qui se retrouve finalement en rivalité avec son propriétaire dont il cherche obsessionnellement à “optimiser” la vie. C’est là que le film cesse d’être seulement drôle, pour devenir en creux une observation plutôt bien vue sur la part (voire le contrôle) que les objets intelligents prennent peu à peu dans nos vies, mais aussi sur la manière (souvent anthropomorphique) dont on les considère.

Le film va d’ailleurs assez loin sur le sujet, avec une séquence finale aussi audacieuse que troublante, qui dit avec humour et sensualité toute l’ambivalence de nos rapports à la technologie. Il n’est pourtant jamais donneur de leçons, et s’avère au contraire extrêmement singulier dans son approche qui mêle la comédie loufoque à une réflexion plus profonde sur les aspirations de l’être humain du XXIe siècle. En prime, la bande originale signée Bertrand BURGALAT et MiM & Tortoz, et son futur tube planétaire Carrément rien à branler, est un pur régal.

Marie-Pauline Mollaret

Film français de Benoit Forgeard (2019) avec William Lebghil, Doria Tillier, Philippe Katerine. 1h47.

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