Critique Ville neuve de Félix Dufour Laperière

Publié le 26 juin, 2019 | par @avscci

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Ville neuve de Félix Dufour-Laperièrre

Librement adapté de la nouvelle La Maison de chef, de Raymond Carver, Ville neuve est le premier long métrage d’animation de Félix Dufour-Laperièrre, qui raconte les retrouvailles d’un couple dans une maison de bord de mer, sur fond de campagne référendaire sur l’indépendance du Québec. Le réalisateur mêle ainsi les possibles intimes à ceux de tout un peuple, proposant une tension permanente entre les deux formes d’espoirs. D’une beauté époustouflante, entièrement dessiné à l’encre de Chine, le film repose sur des choix formels audacieux et singuliers qui lui permettent de s’abstraire du diktat des codes narratifs traditionnels. Ce sont par exemple trois longs (et sublimes) monologues qui structurent le récit, permettant à chacun des trois protagonistes de donner libre cours à leurs sentiments intérieurs. Les dialogues eux-mêmes sont d’une finesse d’écriture remarquable, qui permettent au spectateur, même peu aguerri à la politique locale, de saisir toutes les nuances d’opinions, de désirs et de rancœurs qui meuvent les personnages, et parlent en creux de la société québécoise.

Enfin, Félix Dufour-Laperièrre ne s’interdit aucune expérimentation formelle, offrant une œuvre à la fois minimaliste et foisonnante, qui alterne séquences abstraites oniriques, souvenirs resurgis du passé, et passages qui empruntent le langage cinématographique de la prise de vue réelle, comme ces longs plans fixes sur une fenêtre, ou cet impressionnant plan-séquence dans la rue, lors d’une conversation entre une mère et son fils. On est tout simplement ébloui par la maîtrise, la liberté et la puissance de ce qui est d’ores et déjà l’un des plus beaux films de l’année.

Marie-Pauline Mollaret

Film d’animation canadien de Félix Dufour-Laperièrre (2018), avec les voix de Robert Lalonde, Johanne Marie Tremblay, Théodore Pellerin. 1h16.

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