Critique Sicilian Ghost Story de Fabio Grassadonia et Antonio Piazza

Publié le 18 juin, 2018 | par @avscci

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Sicilian Ghost Story de Fabio Grassadonia et Antonio Piazza

Le titre du deuxième film de Fabio Grassadonia et Antonio Piazza (après Salvo) énonce d’emblée le programme. C’est bien à une histoire de spectres siciliens que nous convient en effet les deux réalisateurs italiens, ceux bien concrets de la mafia et du premier amour, et celui, plus allégorique, d’une victime parmi d’autres de la loi du silence qui règne sur l’île. Dès les premiers plans, une invisible menace plane. La musique est grave, entêtante. La nature luxuriante mais ambivalente. Deux adolescents s’épient, s’observent, vite rattrapés par un chien que l’on croirait tout droit sorti des enfers. Ils ne le savent pas encore mais les deux enfants vivent à la fois les premiers et les derniers instants de leur histoire d’amour naissante. Le lendemain, le jeune homme aura disparu. Enlevé par la mafia pour faire pression sur son père le traître. Celui qui a osé parler.

Autour de la jeune fille, qui veut à tout prix le retrouver, l’omerta règne. Le film suit alors, entre romantisme exacerbé et symbolisme oppressant, son combat désespéré pour la vie et l’espoir. Si la légèreté n’est pas forcément le maître mot du film, cette variation sur le thème de Roméo et Juliette qui mêle le réalisme de faits réels (l’enlèvement du fils de Santino Di Matteo qui avait accepté de coopérer avec la police) et l’onirisme de séquences fantastiques et fantasmées, est aussi troublante que puissante. On est saisi par l’atmosphère étouffante de déni, d’indifférence et de peur qui règne sur les habitants du village, de même que par leur impuissance. Sans fard, le film du duo italien rejette toute imagerie romantique de la mafia au profit d’une poésie noire et fiévreuse qui en prend le contrepied, et montre les effets très concrets des exactions de la pègre et de sa chape de plomb sur le corps et l’esprit de ceux qui en sont les premières victimes.

Marie-Pauline Mollaret

Film italien de Fabio Grassadonia et Antonio Piazza (2017). Avec Julia Jedlikowska, Gaetano Fernandez, Corinne Musallari. 1h57

Critique en partenariat avec l’ESRA.




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