Critique Les Siffleurs de Corneliu Porumbuiu

Publié le 3 février, 2020 | par @avscci

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Les Siffleurs de Corneliu Porumbuiu

En compétition à Cannes l’an dernier, le dernier opus du réalisateur de 12h08 à l’Est de Bucarest (2006) assume son identité de film de genre, tout en s’inscrivant dans la lignée d’un autre de ses fleurons, Le Trésor (2015). Les principaux protagonistes en sont un inspecteur de police à la solde d’un réseau de trafiquants de drogue et une femme fatale. Avec en prime deux éléments susceptibles d’ajouter quelque piquant à l’entreprise : le cadre pittoresque de l’île espagnole de la Gomera aux Canaries et une langue sifflée ancestrale supposée se substituer au langage traditionnel afin de déjouer les écoutes éventuelles. Porumbuiu habille cette intrigue de film noir traditionnel d’un traitement qui lorgne résolument du côté de chez Quentin Tarantino et de quelques autres stylistes anglo-saxons. Avec cette réserve qu’il finit par sacrifier l’intrigue à ses personnages, sans espoir de retour. La facture est certes souvent brillante, mais elle en vient peu à peu à négliger le propos qu’elle est supposée servir. Les connaisseurs argueront qu’Howard Hawks lui-même affirmait avoir réalisé Le Grand Sommeil sans toujours saisir les subtilités de son intrigue tirée d’un roman de Raymond Chandler adapté par William Faulkner. Le spectateur n’en était pas pour autant négligé. Dans Les Siffleurs, la forme prend trop souvent le pas sur le fond et, aussi éblouissante puisse-t-elle paraître, finit par nuire au propos, malgré un parti pris ludique parfois séduisant, une photo superbe et une mise en scène élégante. L’expérience est plaisante bien qu’un peu vaine. Comme une visite à la fête foraine.

Jean-Philippe Guerand

La Gomera. Film roumain de Corneliu Porumbuiu (2019), avec Vlad Ivanov, Catrinel Marlon, RodicaLazar 1h37.




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