Publié le 27 octobre, 2017 | par @avscci
0Brooklyn yiddish de Joshua Z. Weinstein
Joshua Z. Weinstein, documentariste expérimenté, tourne son premier film de fiction dans la communauté hassidique de Brooklyn. Fermeture sur le monde extérieur, utilisation du yiddish et non pas de l’anglais, obligations rituelles sévères, obéissance sans discussion aux injonctions du rabbin, maintien des femmes en sujétion : on pourrait supposer que toute fiction adopterait le point de vue critique d’un observateur méfiant et serait le portrait de personnages décidés à secouer le joug de l’obscurantisme. Le parti pris de Weinstein, juif laïque absolument extérieur à ce monde fermé, est inattendu, et au fond plus intéressant. Si ce qu’il montre de la vie quotidienne suscite nécessairement des questions sur la liberté individuelle et les contraintes communautaires, l’essentiel n’est pas là. Un père veuf. Le rabbin lui ordonne de se marier. Il ne veut pas le faire sous la contrainte et désire prouver qu’il est capable d’élever seul son petit garçon. Ses maladresses, sa timidité, son énergie, ses résistances instinctives, bien en-deçà d’une révolte franche, sont interprétées par Menashé Lustig avec délicatesse, discrétion, talent. On est d’autant plus ému d’apprendre que le comédien reproduit dans la fiction des événements qu’il a réellement vécus. Weinstein filme à l’intérieur de la communauté, sans supériorité mal venue, sans naïveté, et présente simplement, admirablement, un homme saisi par des questions morales et sentimentales. On n’entend que le yiddish dans le film, hormis de coûts dialogues en anglais avec des latinos récemment émigrés et ne s’exprimant qu’avec un très fort accent. Huis clos sans doute, mais le plus petit village est toujours le reflet du monde tout entier.
René Marx
Film américain de Joshua Z. Weinstein (2017), avec Menashé Lustig, Ruben Niborski, Yoel Weisshaus, Meyer Schwartz. 1h 22.
Critique en partenariat avec l’ESRA.