Critique Antoinette dans les Cévennes de Caroline Vignal

Publié le 17 septembre, 2020 | par @avscci

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Antoinette dans les Cévennes de Caroline Vignal

Il y a dans l’appel de la nature qui saisit actuellement les citadins quelque chose de l’innocence assumée décrite par Gustave Flaubert dans Bouvard et Pécuchet. C’est ce constat dont rend compte Caroline Vignal dans son deuxième long métrage, vingt ans tout juste après Les Autres Filles. Quand son amant lui annonce sa décision de passer ses vacances avec sa femme et sa fille au lieu de roucouler en se regardant les yeux dans les yeux comme il le lui avait promis, une institutrice décide de marcher sur les traces de la petite famille du traître afin de provoquer une rencontre fortuite. Accompagnée d’un âne, elle part donc en randonnée à travers le Sud de la Lozère, sur les traces de l’écrivain Robert Louis Stevenson. Une alternative païenne au chemin de Compostelle au fil de laquelle les marcheurs séjournent dans des gîtes où ils échangent leurs impressions de voyage. Prenant pour prétexte la formule familière du road movie, Caroline Vignal signe une comédie primesautière qui s’avère indissociable de ses deux interprètes principaux. Souvent vue dans des rôles secondaires où il lui suffisait parfois d’une scène pour crever l’écran, Laure Calamy trouve enfin un personnage à sa démesure et s’impose comme une nature comique désormais indispensable. Mais chez elle, le rire est toujours au bord des larmes et lorsque le clown ôte son masque, sa mine est loin d’être réjouie. Cette longue marche apparaît en effet devant la caméra inspirée de Caroline Vignal comme une épreuve de vérité : celle d’une quadra qui n’a pas envie de vieillir seule. Son partenaire est pour sa part un débutant : c’est cet âne qui commence par lui faire des misères en refusant d’avancer, puis deviendra le plus fidèle des compagnons. Comme si ses caprices consistaient à mettre à l’épreuve cette fille des villes rompue par son métier d’institutrice à mater, à amadouer et à commander. Cette fable intemporelle est un délice pour l’esprit comme pour les yeux.

Jean-Philippe Guerand

Film français de Caroline Vignal (2020), avec Laure Calamy, Benjamin Lavernhe, Olivia Côte 1h35.




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