Critique

Publié le 11 septembre, 2023 | par @avscci

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Ama Gloria de Marie Amachoukeli 

Révélée par Party Girl (2014), le film poignant qu’elle avait coréalisé avec ses camarades de la Femis, Claire Burger et Samuel Theis, Marie Amachoukeli est la dernière des trois à se lancer en solo. Comme C’est ça l’amour (2018) et Petite Nature (2021), Àma Gloria évolue sur la corde raide des sentiments dans une suprême intimité. La réalisatrice s’y inspire d’un souvenir d’enfance : celui d’une nounou capverdienne qui l’a emmenée un jour en vacances dans son pays où vivaient ses propres enfants dont elle vivait séparée. Un effet de réalité saisissant filmé ici avec une délicatesse infinie où une petite fille européenne élevée dans un cocon découvre l’envers du décor, sans toujours comprendre la profonde injustice qui régit la vie par procuration de cette femme privée de sa progéniture pour pouvoir gagner de quoi l’élever décemment. La singularité de ce film réside dans son postulat qui consiste à montrer l’absurdité de cette situation et son interprétation par une petite fille trop jeune pour en saisir l’inanité. La qualité du regard de Marie Amachoukeli réside dans sa capacité à se mettre à la place de l’enfant de six ans qu’elle a été, avec son innocence spontanée, mais aussi parfois un caractère capricieux qui tranche avec l’accueil chaleureux que lui réservent ses hôtes. Àma Gloria repose pour une bonne part sur la délicatesse de la direction d’acteurs d’une réalisatrice tout entière tournée vers l’humanité de ses protagonistes. Avec cette quête parallèle des deux personnages vers leur indépendance. Un film qui se quitte la gorge nouée au terme d’un rare éblouissement.

Jean-Philippe Guerand

Film belgo-français de Marie Amachoukeli (2023), avec Louise Mauroy-Panzani, Ilça Moreno Zego, Arnaud Rebotini. 1h24.




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