Critique

Publié le 7 février, 2023 | par @avscci

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Aftersun de Charlotte Wells

Premier long métrage délicat signé par la réalisatrice écossaise Charlotte Wells, Aftersun ravive par très petites touches le souvenir doux-amer de quelques jours de vacances passés en Turquie par la jeune Sophie avec son père Calum. S’éloignant d’une construction classique qui serait basée sur de simples allers et retours dans le temps, le film se concentre principalement sur les séquences estivales, ne montrant que quelques bribes évanescentes du présent. On a parfois même l’impression que ces passages sont des projections fantomatiques de ce qui pourrait advenir, aux contours flous et incertains.

C’est que tout est particulièrement flottant dans ce récit volontairement relâché qui capte avec douceur et sensibilité la complexité de la relation entre les deux personnages. Avec beaucoup de non-dits et d’ellipses, mais aussi une utilisation fine des images vidéo tournées par Sophie elle-même, et qui révèlent une autre facette de Calum, le film saisit dans toute leur ambivalence la multiplicité des émotions à l’œuvre, de la joie simple de vivre le moment présent à la mélancolie latente qui rattrape tour à tour les deux protagonistes. À cela s’ajoute implicitement la nostalgie rétrospective portée par Sophie devenue adulte.

Malgré une intrigue réduite à peu de choses, une succession de moments presque anodins et un récit volontairement minimaliste, Aftersun parvient ainsi à déjouer les attentes un peu banales du spectateur (les conflits de génération, le début de l’adolescence, le premier amour…) pour se concentrer sur le lien qui unit le père et la fille dans une plongée introspective qui est véritable dentelle de sentiments d’une grande puissance et d’une extrême justesse.

Marie-Pauline Mollaret

Film britannique de Charlotte Wells (2022), avec Paul Mescal, Frankie Corio, Celia Rowlson-Hall. 1h38.




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