Critique

Publié le 20 octobre, 2022 | par @avscci

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Azor d’Andreas Fontana

Pour son premier long métrage, le cinéaste suisse Andreas Fontana n’a pas manqué d’ambition. Il en situe l’intrigue dans l’Argentine de 1980 où un banquier privé vient remplacer son associé mystérieusement porté disparu, alors qu’une junte militaire implacable vient de succéder à une autre. Non seulement le cinéaste réussit la gageure de reconstituer l’époque avec un soin méticuleux, mais il s’immisce dans les arcanes du pouvoir sous la houlette d’un homme d’influence habitué à frayer avec les milieux les plus huppés et à jouer les bons offices. L’Argentine d’Azor ressemble à un empire décadent où les notables se retrouvent, jumelles autour du cou, dans les tribunes les plus huppées des hippodromes et dans des clubs cadenassés comme… des coffres-forts suisses. Le réalisateur décrit son personnage principal non seulement en éminence grise dont les costumes impeccables dissimulent une rapacité présentée comme une nouvelle forme de colonialisme, mais aussi dans la posture d’un conquistador des temps modernes pour qui l’argent n’est jamais vraiment sale. Plus sobre que jamais, Fabrizio Rongione, acteur fétiche des frères Dardenne, est l’interprète idéal de ce rôle ambigu. La justesse du casting va de pair avec l’élégance d’une mise en scène qui a le bon goût de ne jamais se montrer ostentatoire, sous prétexte de nous introduire parmi cette faune interlope dépourvue de convictions, mais pas de moyens. Ce portrait de groupe d’un monde en voie d’effondrement s’accroche aux spectres d’un âge d’or révolu dont ne subsistent que quelques signes extérieurs aussi dérisoires que trompeurs.

Jean-Philippe Guerand

Film helvéto-argentino-français d’Andreas Fontana (2021), avec Fabrizio Rongione, Stéphanie Cléau, Elli Medeiros, Gilles Privat… 1h40. Sortie le 12 octobre.




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